République et canton du Jura

Rapport du Gouvernement au Parlement sur la reconstitution de l'unité du Jura du 20 juin 2007

Date : 04.06.2007 00:00:00

Introduction

Après une période délicate marquée par l’acceptation de l’initiative « Un seul Jura » par le Parlement jurassien, l’année écoulée a permis le retour à un climat apaisé dans la politique jurassienne.  Le 28 août 2006, l’Assemblée interjurassienne (AIJ) a lancé l’étude sur l’avenir institutionnel de la région, conformément au mandat confié par le Gouvernement jurassien et le Conseil-exécutif bernois, sous les auspices du Conseil fédéral.

Cette nouvelle étape constitue un événement majeur dans les relations interjurassiennes, car elle permet d’entrer au cœur du dispositif prévu par l’Accord du 25 mars 1994 pour régler politiquement la Question jurassienne. Après une période qui a permis de recréer les conditions d’un dialogue constructif entre les populations du Jura et du Jura bernois et de retisser des liens institutionnels et personnels, l’AIJ aborde désormais le volet institutionnel de son mandat. Cette volonté de légitimer l’AIJ comme acteur exclusif pour ce qui a trait à la réalisation de l’étude a d’ailleurs été régulièrement appuyée par le Parlement lors des débats relatifs à la loi « Un seul Jura ».

Le Gouvernement jurassien place beaucoup d’espoir dans cette étude et met tout en œuvre pour qu’elle puisse se dérouler dans un climat serein et en respectant les délais et les budgets prévus. Sur le plan politique, il entend mettre à profit la période actuelle pour arrêter sa stratégie une fois que l’AIJ aura rendu son étude, puisqu’il lui incombera de formuler une offre de partage de souveraineté à la population du Jura bernois. Il s’agit aussi, dans le canton du Jura, de préparer les esprits à une probable et nécessaire remise en question complète des institutions jurassiennes actuelles.

Les conditions sont aujourd’hui réunies sur le plan politique pour assurer le bon déroulement d’un processus qui constitue l’aboutissement de la politique de dialogue et de concertation menée depuis 1994. Le Gouvernement jurassien, avec ses partenaires, est déterminé à insuffler à ce dossier la même dynamique positive que celle qui a prévalu ces dernières années, afin d’aboutir à la solution institutionnelle qui corresponde le mieux aux intérêts de la région jurassienne. 


L’étude de l’AIJ sur l’avenir institutionnel de la région

Après plusieurs mois de travaux préparatoires, l’AIJ a donc débuté l’étude sur l’avenir institutionnel de la région.

Elle a décidé de scinder son travail en quatre phases. Les deux premières, visant à dresser l’état des lieux de la situation actuelle et à identifier les synergies actuelles et futures dans la perspective d’une entité à six districts, sont terminées et ont fait l’objet de rapports intermédiaires. L’AIJ travaille actuellement à la troisième phase, qui consiste à étudier les attentes vis-à-vis d’un nouvel Etat en général, en particulier quelles seraient les conséquences institutionnelles, financières et économiques d’une entité à six districts. L’Assemblée se penchera enfin dans une dernière phase sur l’examen du partenariat direct, des effets du statut particulier et d’éventuelles autres pistes qu’elle aurait identifiées.

A ce jour et conformément à la volonté exprimée par les mandants, qui se sont réunis à trois reprises au sein de la Conférence tripartite durant l’année écoulée, les travaux se déroulent selon le calendrier prévu. L’AIJ dispose des moyens financiers et logistiques nécessaires pour réaliser l’étude en toute indépendance. Les administrations ont collaboré activement à la recherche d’informations et quelques mandats ont également été confiés à des experts. Selon les derniers bilans, les budgets sont respectés et tout indique que l’AIJ sera en mesure de rendre ses conclusions en août 2008.
Se préparer en vue d’un changement fondamental

D’ici là, le Gouvernement va préparer activement « l’après » étude de l’AIJ. Dans les mois à venir, il arrêtera sa stratégie s’agissant de la procédure à suivre, puisque la loi « Un seul Jura » prévoit que le Gouvernement formule une proposition de partage de souveraineté à la population du Jura bernois. Il est probable que cette démarche implique une révision de la Constitution et donc une consultation du peuple, car le droit jurassien n’habilite pas le Gouvernement à mettre en cause la souveraineté du canton telle qu’elle se présente aujourd’hui. Dans cette perspective, il s’agit donc de procéder dès à présent à tous les travaux préparatoires pour qu’à réception de l’étude, la suite de la procédure soit déterminée. 

Le Gouvernement entend aussi préparer sans tarder les esprits à une remise en question, probablement fondamentale, du fonctionnement de l’Etat jurassien. L’étude implique en effet un exercice de transparence auquel le Gouvernement souhaite se livrer en toute objectivité. La formulation d’une offre de partage de souveraineté entraînera la remise en question de certains acquis à l’intérieur du canton et une prise de risque à laquelle le Gouvernement jurassien est prêt à souscrire, dans la mesure où l’enjeu de ce processus est bien la création d'une nouvelle entité cantonale à six districts,  objectif qui dépasse tous les clivages et intérêts particuliers.  Il s’agit dès lors de tout mettre en œuvre pour que le processus engagé ait le plus de chance d’aboutir.

Car même si l’AIJ travaille actuellement dans un climat d’ouverture, la population du Jura bernois demeure toujours majoritairement dubitative quant à la création d’une nouvelle entité politique à six districts visant à la reconstitution politique du Jura. Il est impératif que le canton du Jura adresse des signaux clairs à la population du Jura bernois et propose une vision d’avenir qu’elle puisse partager. En définitive, ce sont les faits et les chiffres qui vont compter de manière significative dans la décision finale des habitants du Jura bernois.

Les deux régions doivent en outre veiller à l’image qu’elles projettent à l’extérieur. Car tout  ce qui nuit à la crédibilité de la région peut être évoqué aisément pour freiner le rapprochement interjurassien. Actuellement, on observe par exemple que la persistance d’importants déficits structurels a toute son importance dans la perception qu’on se fait à l’extérieur du Jura. Le Jura bernois souffre également d’une appréciation négative, comme a pu en témoigner le début de polémique né de la publication d’articles dans la Berner Zeitung, présentant la région comme étant « assistée » au sein du canton de Berne. Confrontées au même déficit d’image, les deux régions auraient tout intérêt à mettre leurs forces en commun dans ce domaine également.
Les effets bénéfiques de la souveraineté

Sur le long terme, les chiffres plaident clairement en faveur de la souveraineté cantonale. Pour ne citer que quelques exemples, entre 1980 et 2005, la population du canton du Jura a progressé de 6,3%, alors que celle du Jura bernois a régressé de 2,2%. La souveraineté a permis de lancer des projets essentiels pour l’avenir de la région, comme la construction de l’autoroute A16, qui profitera aussi au Jura bernois. La création du canton a donné une visibilité accrue à la région sur la scène fédérale et plus de moyens pour défendre ses intérêts. Les trois districts restés bernois ont indirectement profité de la création du canton, puisque leurs besoins ont également dû être pris en compte et qu’un statut particulier lui a été octroyé. 


La collaboration interjurassienne

Le meilleur moyen de renforcer le sentiment d’appartenance à une communauté consiste à intensifier encore la collaboration interjurassienne.

En dépit du fait que la politique jurassienne se focalise actuellement sur l’étude de l’AIJ, de nombreux projets interjurassiens ont néanmoins vu le jour durant l’année écoulée. Fait réjouissant, ils émanent non seulement du secteur public, mais aussi parfois de partenaires privés, comme en témoigne par exemple le rapprochement entre la BIMO et le mediSIAMS, qui a permis d’augmenter la visibilité de ces deux salons commerciaux.

Pris isolément, les projets réalisés en 2006 ne sont pas forcément tous spectaculaires, mais ils contribuent ensemble à une dynamique visant à une meilleure compréhension mutuelle entre les deux régions. Ainsi, Jura et Jura bernois ont fait preuve de solidarité dans plusieurs dossiers importants, en particulier l’implantation de la Haute-Ecole Arc, l’entreprise Boillat à Reconvilier, les délais et le financement de la construction de l’A16, le raccordement ferroviaire au TGV Rhin-Rhône. Ils font également front commun pour la sauvegarde des pâturages boisés, éléments typiques et remarquables de l’espace jurassien. Les deux gouvernements sont appelés par l’AIJ à favoriser les collaborations intercantonales dans l’élaboration des projets qui s’inscrivent dans le cadre de la nouvelle politique régionale (NPR), un outil essentiel pour le développement régional. Enfin on notera encore, sans viser l’exhaustivité, la parution d’un guide touristique commun aux deux régions, la création d’un groupe de projet composé d’enseignants, qui va élaborer un livre d’histoire jurassienne commun, et l’organisation de deux journées de sport scolaire réunissant des équipes du Jura et du Jura bernois.

Avancées significatives dans les domaines de la culture et de la santé

La culture tient une place privilégiée dans la politique jurassienne, attendu qu’elle participe à l’identité du pays jurassien et que les liens entre artistes et institutions ne se sont jamais distendus. La création d’un Office interjurassien des affaires culturelles constitue donc un objectif majeur. Un groupe de projet est actuellement à l’œuvre et les exécutifs devraient pouvoir se prononcer sur ses propositions avant la fin de l’année 2007.

En parallèle, différentes commissions interjurassiennes se sont mises en place ou sont en passe de l’être, dans les domaines de la littérature, des arts de la scène, des arts visuels et des arts appliqués. Ces commissions permettront d’avoir une vision commune dans tous ces domaines et de développer les projets à l’échelle régionale. La perspective de créer un centre régional d’expression artistique (CREA) se précise également et l’expertise confiée à un mandataire externe devrait être publiée d’ici l’automne 2007. Ce centre serait un formidable outil de promotion pour la culture régionale et un élément fédérateur au même titre que peut l’être par exemple la Fondation rurale interjurassienne. 

A noter encore sur le plan culturel la remise du prix culturel 2006 de l’AIJ à l’association TROU, éditrice à Moutier d’une revue d’art multiculturelle du même nom.

Dans le domaine de la santé, les deux gouvernements ont signé début 2007 une nouvelle convention qui donne un coup d’accélérateur à une planification hospitalière commune. Il s’agit, pour les deux groupes de projet constitués, d’examiner en particulier la répartition des missions entre les sites hospitaliers, en garantissant la sécurité des patients et la qualité des soins. Les effets prévisibles de la révision en cours de la LAMal rendent cette réflexion nécessaire car il est avéré que le Jura et le Jura bernois n’ont pas la taille suffisante pour héberger plusieurs sites hospitaliers généralistes sur leurs territoires.

En matière de santé encore, une collaboration est engagée dans le domaine des soins palliatifs, à laquelle le canton de Neuchâtel est également associé. Enfin il a été décidé récemment que les femmes du Jura bernois bénéficieront à l’avenir de la prise en charge du dépistage du cancer du sein, le canton de Berne appliquant à leur intention le modèle mis en place dans le Jura.
Donner de nouvelles impulsions

D’autres dossiers nécessitent de nouvelles impulsions. Même si parfois, les écueils techniques, juridiques ou liés à des structures incompatibles entre le Jura et le Jura bernois ne manquent pas, le Gouvernement est déterminé à faire aboutir différents dossiers revêtant à ses yeux un intérêt majeur, par exemple dans le domaine du sport, du tourisme, de la justice (tribunal des mineurs), de la statistique ou de l’égalité entre femmes et hommes.

Dans cet esprit, le Gouvernement a rencontré récemment le bureau du Conseil du Jura bernois (CJB) et a pu constater que ses membres partagent la même volonté d’élargir le nombre des institutions communes. D’ailleurs, le CJB est l’interlocuteur direct du Gouvernement jurassien pour les questions liées aux institutions communes et constitue un précieux relais afin de mieux saisir les besoins de la population du Jura bernois.

Le Gouvernement entend poursuivre son travail de conviction par les faits. Il estime que la création de nouvelles institutions communes marquantes serait de nature à renforcer le sentiment d’appartenance à une même communauté et permettrait à la région de s’affirmer comme un espace capable d’imaginer des solutions novatrices pour assurer son développement futur. 

Conclusion

Dans cette période charnière pour la politique jurassienne, marquée par la réalisation de l’étude de l’AIJ portant sur l’avenir institutionnel de la région, le Gouvernement entend concentrer son action sur quatre axes prioritaires.

Le premier vise à assurer à l’AIJ un climat propice à la conduite de ses travaux. Il s’agit en particulier de maintenir des liens étroits avec l’ensemble des partenaires, de faciliter toutes les démarches de l’AIJ et de contribuer, sans tabou et avec professionnalisme, à l’exercice de transparence et de prospective que constitue l’étude d’une future entité à six districts.

Le deuxième objectif vise à anticiper le moment où l’étude de l’AIJ sera remise aux deux gouvernements, en août 2008. L’étude n’est pas une fin en soi, mais sera le prélude à un processus qui verra notamment le Gouvernement formuler une offre de partage de souveraineté à la population du Jura bernois. Il est donc nécessaire d’anticiper toutes les questions de procédure, mais aussi de préparer les esprits, en particulier dans le canton du Jura, à un changement fondamental impliquant notamment la remise en question de certains acquis. 

Le Gouvernement va appuyer sa politique sur un troisième axe, qui consiste à créer de nouvelles institutions communes dans tous les domaines où cela est possible. Travailler à une échelle plus grande relève souvent d’une nécessité économique, et peut être vital pour maintenir dans la région des compétences et des structures viables. En outre, l’expérience de ces dernières années montre que les projets réalisés en commun sont de nature à décrisper les relations entre les personnes et favorisent une meilleure compréhension mutuelle.

Enfin dernier axe stratégique, le Gouvernement jurassien doit rendre le Jura plus attractif en mettant en valeur les principaux atouts de la région, notamment son savoir-faire économique et sa qualité de vie. Il s’agit en particulier de proposer des projets susceptibles de séduire les habitants du Jura bernois, car la création d’une nouvelle entité à six districts ne se fera pas sans l’accord des deux partenaires. La confiance rétablie après plus d’une décennie de dialogue doit désormais se transformer en volonté de réaliser des projets communs et de se projeter, ensemble, vers l'avenir.


AU NOM DU GOUVERNEMENT DE LA
RÉPUBLIQUE ET CANTON DU JURA

Laurent Schaffter            Sigismond Jacquod
Président                        Chancelier d'État

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