L'édification d'un abri des biens culturels dans le cadre de la restauration de l'Hôtel-Dieu impliqua l'excavation de la cour arrière (est) de ce bâtiment. Une tranchée de sondage en automne 1991 induisit une intervention archéologique.

Plusieurs murs sont apparus. Certains correspondent à des bâtiments encore visibles sur les plans de 1752. Par contre, d'autres fondations se rapportent à des bâtisses ou murs plus anciens, dont certains pourraient remonter au Moyen Age. Un des édifices fut probablement détruit par un incendie: une réserve de graines carbonisées a livré plusieurs milliers de lentilles. Une fosse riche en charbons de bois, à la base de la partie médiévale de la stratigraphie, a été datée par carbone 14, du 10e ou 11e s.

Au-dessous, on a découvert un mobilier archéologique très varié. Mentionnons tout d'abord un tesson de céramique sigillée et une monnaie très usée attribuée avec circonspection à l'empereur Tibère. Un tesson de jatte à bord rentrant signale une présence à l'Age du Fer, alors qu'un tesson à bord déversé doit être placé à l'Age du Bronze final. Une pointe de flèche en silex, à base convexe, est typologiquement à situer au Néolithique.

Mais ce sont surtout plus d'un millier de petits éclats et d'outils en silex qui ont attiré l'attention. La présence de microlithes, de lames à encoches ou à bord abattu et de nucléus de petites dimensions correspond au Mésolithique. Seule une étude plus approfondie permettra de déterminer le nombre de phases d'occupation et de les dater plus précisément. L'absence de structures ne permet pas de supposer un habitat de chasseurs-cueilleurs nomades, mais la présence des nombreux éclats et nucléus suggère au moins un atelier de taille de silex.

A défaut du site archéologique, le promeneur pourra profiter de sa présence en ces lieux pour visiter le musée de l'Hôtel-Dieu, sa pharmacie ancienne, le trésor de l'église Saint-Pierre et les vitraux de Saint-Germain.
 

L'Hôtel-Dieu: un site préhistorique au cœur de la vieille ville de Porrentruy

Vue de la fouille en cours. Les restes du site mésolithique se trouvait à la base du remplissage de la pièce encadrée par quatre murs au centre de la photographie. Vue du site en cours de fouille.

Situé à une altitude d'environ 430 m, le gisement de l'Hôtel-Dieu se trouve dans le centre historique de la vieille ville de Porrentruy, à une centaine de mètres au sud-ouest et en surplomb de l'Allaine. Sa cuvette est alimentée par diverses sources, comme par exemple le Bacavoine, laissant ainsi présumer un contexte préhistorique marécageux.

Au cours de l'hiver 1991-92, dans le cadre de travaux de construction municipaux, la Section d'archéologie de l'Office du patrimoine historique du canton du Jura procéda à un sondage, puis à une fouille de sauvetage, sous la direction de P. Paupe, sur un secteur de quelque 200-250 m2. La surface laissa apparaître des structures médiévales : murs et fosses. Lors du creusement d'une tranchée à l'intérieur de l'une de ces structures, les fouilleurs constatèrent l'apparition d'un niveau riche en silex taillés.

Série d'armatures destinées à la fabrication des armes de chasse. En haut deux triangles scalènes; en bas une pointe à base naturelle, une pointe à troncature oblique et un fragment de lamelle scalène. Série d'armatures destinées à la fabrication des armes de chasse.

La matière première principalement utilisée est originaire d'Alle, puis, dans une moindre mesure, on trouve un autre silex régional : celui de Courchavon. Des artefacts moustériens ont été récupérés lors de l'exploitation du gîte d'Alle.

Les armatures comprennent surtout des pointes, à base naturelle et à base transversale, et des triangles scalènes. Ce corpus est complété par quelques lamelles scalènes et quelques segments, ainsi que par deux trapèzes. La technique du microburin a été mise en œuvre pour la réalisation de ces pièces

Le débitage est caractérisé par la production de lamelles destinées à l'aménagement des armatures. Toutefois, il arrive que lors du débitage, et plus particulièrement lors des premières phases, que certaines de ces pièces dépassent les dimensions voulues, elles entrent alors dans la catégorie des lames. Le débitage est caractérisé par la production de lamelles destinées à l'aménagement des armatures.

Ce sont les produits retouchés, que ce soient des éclats, des lames ou des lamelles, qui dominent le corpus; toutefois la part des retouches accidentelles ne doit pas être minimisée. Les pièces à coche, les grattoirs, et à un degré moindre les burins, sont également bien présents.

L'objectif principal recherché par les tailleurs est la production de supports destinés à être transformés en armatures. Ce sont donc des lamelles qui ont été principalement débitées. Leur débitage a principalement été effectué à partir d'une table. La gestion du carénage a pu amener à l'ouverture d'une table secondaire, l'exploitation devenant alors semi-tournante. Cette dernière peut être unipolaire ou bipolaire. Dans quelques cas, ce sont des éclats qui ont servis de support au débitage.

L'industrie de l'Hôtel-Dieu s'inscrit dans le techno-complexe du Jura septentrional (d'influence beuronienne) du Mésolithique moyen.

On peut signaler la présence de rares objets néolithiques dont une pointe de flèche et une pièce esquillée. Ce dernier type d'outil n'est connu dans la région qu'au Campaniforme.

Fiche technique

Commune

Porrentruy

Site

Hôtel-Dieu

Datation, Type de site
principal  

secondaire

Mésolithique, atelier de taille
Moyen Age, structures et murs
Néolithique (Campaniforme ?), objets isolés
Age du bronze, objets isolés
La Tène, objets isolés
Époque romaine, objets isolés

Année de découverte

1991

Date de fouille

1991 - 1992

Surface de fouille

200 - 250 m2

État de la fouille

Achevée

Étude

Achevée

Responsable(s)

OCC / F. Schifferdecker
Patrick Paupe

Dépôt de collections

Office de la culture, Porrentruy

Publications

SCHIFFERDECKER, F. Porrentruy JU, Hôtel Dieu, ASSPA 76, 1993, p. 187; ASSPA 79, 1996, p. 227.
SCHIFFERDECKER, F. Archéologie, rapport annuel d'activité, Jurassica 6, 1992, p. 19;
Jurassica 7, 1993, p. 29.
BORGEAUD, P.-A. Rapport 2016 de l’archéologie cantonale, pp. 105-126