Dans cette section, vous allez découvrir un exemple concret mais simple des bénéfices apportées par le respect de l'accessibilité.
Pour pouvoir utiliser un ordinateur, un non-voyant utilise un logiciel de revue d'écran. Il s'agit d'un logiciel qui reproduit les textes qui se trouvent à l'écran, vocalement grâce à une voix synthétique, ou bien en braille sur une tablette prévue à cet effet qu'on appelle plage braille, ou bien les deux à la fois. On n'utilise que le clavier pour faire fonctionner la machine, car il est impossible d'utiliser la souris si on ne peut pas voir ce qui se trouve à l'écran.
Lorsqu'on navigue dans un document, par exemple une page web, ce logiciel suit le curseur clignotant et reproduit le texte qui se trouve à proximité. On déplace généralement ce curseur avec les flèches de direction. On peut avancer et reculer ligne par ligne, mot par mot, caractère par caractère, à sa convenance, mais ce qu'il faut surtout retenir est qu'on accède basiquement à l'information linéairement. On lit globalement une page de haut en bas et on ne peut pas faire autrement. Comparez cela à la bande d'une cassette audio, que vous pouvez juste avancer ou reculer.
Il n'existe aucun moyen simple de rejoindre un endroit particulier de la page. Par exemple, on ne peut pas décider de commencer directement la lecture à tel ou tel point, et on ne peut pas sauter le menu de navigation qui est le même sur toutes les pages d'un même site et qui devient énervant à force d'être sans cesse répété. De même que sur votre cassette audio, vous ne pouvez pas vous positionner exactement au début de la prochaine chanson d'une façon simple. La seule chose que vous pouvez faire est avancer et reculer, mais vous n'y arriverez de toute évidence pas du premier coup.
Pourtant, instinctivement, c'est ce qu'un utilisateur bien voyant fait sans même s'en rendre compte : il dirige directement ses yeux sur la partie qui l'intéresse et il saute le menu de navigation et les publicités, de même qu'il est capable de sauter un chapitre qui ne l'intéresse pas dans un livre de plusieurs pages. Lorsqu'on lit un texte vocalement, tout cela n'est pas possible facilement.
La conséquence est que l'accès à l'information recherchée est relativement long. Par exemple, si vous avez besoin de la première phrase du chapitre 7, juste cette première phrase et rien d'autre, vous devez d'abord lire la totalité des chapitres 1 à 6 avant d'y parvenir, ou alors vous devez avancer et reculer au petit bonheur la chance. En tant que bien voyant, vous imaginez rapidement le cauchemar que cela représente.
C'est ici que l'accessibilité entre en jeu. Le lecteur d'écran est capable de devenir intelligent et de laisser l'utilisateur non-voyant choisir quel chapitre il veut lire dans le cas du livre, ou bien s'il veut sauter les menus de navigation pour atteindre le contenu principal dans le cas d'une page web.
Pour que cela soit possible, il faut que celui qui a créé le document ou la page web ait préalablement expliqué à l'ordinateur où sont les titres de chapitre ou où est le menu de navigation. On appelle cela la structuration logique du contenu ou la sémantique. La sémantique est l'art d'expliquer le rôle de chaque partie d'un texte : ceci est un titre, ceci est un paragraphe, ceci est un lien, ceci est un menu, etc. Même si d'un point de vue strictement visuel cela paraît tout à fait clair sans autre indication, ce n'est pas parce qu'une phrase est centrée, écrite en plus gros et en rouge tout en haut d'une page qu'il s'agit d'un titre. L'ordinateur ne peut pas le deviner si vous ne lui avez pas dit clairement, rappelez-vous qu'un ordinateur ne fait que ce qu'on lui demande.
La sémantique et la structuration logique des contenus constitue un premier pas nécessaire pour assurer une accessibilité minimale. Ce n'est hélas de loin pas suffisant, mais cela constitue déjà un excellent début.
Un ordinateur n'étant pas capable de comprendre le sens d'un texte par lui-même, le rédacteur d'un document numérique a aussi pour devoir de la lui indiquer au fur et à mesure qu'il rédige. Ce rôle doit être idéalement assuré par un rédacteur contributeur, car qui mieux que lui connaît le sens de son texte? Reprendre celui de quelqu'un d'autre après coup, surtout s'il date un peu, n'est jamais simple, même si on peut l'envisager aussi.
Dès le moment où l'ordinateur sait où sont les titres de chapitre, le logiciel de revue d'écran peut en dresser une liste et la proposer à l'utilisateur non-voyant, qui pourra alors en choisir un pour commencer la lecture à partir de là. De cette manière, l'accès à la première phrase du chapitre 7 ne passe plus par une lecture obligatoire des chapitres 1 à 6. On a déjà résolu un gros problème, et la règle est finalement assez simple : indiquer à l'ordinateur quel est le sens du texte en le structurant logiquement.
Il existe une multitude d'autres problèmes, qui peuvent être résolus en appliquant certaines règles. La non-voyance n'est pas le seul handicap pour qui l'accessibilité est importante. Il existe de nombreux outils d'aides techniques ton le logiciel de revue d'écran n'est qu'un représentant parmi tant d'autres, bien qu'il soit sans doute encore le plus connu. Il existe aussi des problèmes, des dilemmes d'accessibilité qui sont parfois insolubles, car il est difficile de contenter tout le monde à la fois...
Pour en savoir plus sur les lecteurs d'écran et la façon qu'on les non-voyants de se servir d'un ordinateur, vous pouvez aller regarder la vidéo «L'ordinateur des aveugles».