Le Néolithique

Le Néolithique ancien: traces fugaces des premiers agriculteurs

Pointes de flèches triangulaires. Provenance, Delémont-En la Pran. Pointes de flèches triangulaires. Provenance, Delémont-En la Pran.

Les débuts de la sédentarisation et de la néolithisation (élevage et agriculture) restent très discrets dans le Jura, même si la région est aux confins des deux grands courants propres à l'Europe occidentale, le danubien, occupant les plaines d'Europe centrale et le cardial méditerranéen, remontant par la vallée du Rhône et de la Saône.

En vallée de Delémont, un atelier de taille du Néolithique a été découvert sur le site de Delémont-En La Pran. Du silex importé d'une part d'Alle et d'autre part de Pleigne-Löwenburg y a été débité. Des déchets de taille, des outils et des armatures de flèches sont répartis autour d'un foyer. Les armatures de flèches sont de deux types: des perçantes triangulaires à base concave et des tranchantes trapézoïdales qui se distinguent des trapèzes mésolithiques par une grandeur nettement supérieure et une moins grande régularité des lames qui ont servi de supports. Un pot en céramique, à fond rond et comprenant des mamelons situés à mi-hauteur, accompagne cet ensemble daté par typo-chronologie de la première moitié du 5e millénaire. Les caractéristiques aussi bien de la céramique que des armatures montrent une affinité avec la région rhénane et plus particulièrement avec la culture de Hinkelstein qui s'y développe autour de 4800 av. J.-C.
 

Armatures tranchantes. Provenance, Delémont-En la Pran. Armatures tranchantes. Provenance, Delémont-En la Pran.

Quelques grottes franc-comtoises proches du Jura ont livré des céramiques caractéristiques de la deuxième moitié du 5e millénaire. A la même époque se développent des échanges à longue distance: des haches en pierre polie, d'origine vosgienne, transitent par le Jura en direction des lacs du Plateau suisse (Zürich, Bienne, Neuchâtel, etc). Une telle hache, neuve, et une autre, encore non polie, ont été découvertes à Alle.

Le Néolithique moyen: il y a 5000 ans, le premier monument jurassien

Hache en pierre du Néolithique moyen d’Alle, Noir Bois (de face et de profil). Hache en pierre du Néolithique moyen d’Alle, Noir Bois (de face et de profil).

En Ajoie, un habitat est attesté à Alle-Sur Noir Bois, à la fin du Néolithique moyen, et datée par C-14 autour de 3500 av. J.-C. Le niveau d'occupation comprend des trous de poteau et des fosses, des haches et des ciseaux en pierre polie, de la céramique et des silex taillés sur place. Cet outillage lithique se compose principalement de grattoirs, de pointes de flèche triangulaires et de lames à retouches obliques. Des pièces esquillées et des briquets complètent cet inventaire. La matière débitée provient essentiellement du lieu. Le silex du Jura a été largement exporté sur les sites lacustres du plateau suisse. Celui d'Alle et celui de Löwenburg s'y retrouvent aux 4e et 3e millénaires, ce qui atteste que la chaîne jurassienne est alors régulièrement franchie. Cependant, nous connaissons peu de chose sur la production de ces objets. L'étude en cours nous donnera l'opportunité d'examiner ce qui se passe à proximité immédiate d'un gisement de matière première et de voir comment s'effectue la taille sur ce type de site durant le Néolithique.
 

La Pierre Percée de Courgenay, vestige d’un monument sépulcral (3000 av. J.-C.). La Pierre Percée de Courgenay, vestige d’un monument sépulcral (3000 av. J.-C.).

De plus, la Pierre Percée de Courgenay, dalle frontale d'un dolmen, est le dernier témoignage d'un monument sépulcral collectif érigé vers 3000 av. J.-C. selon les coutumes propres au flanc nord de la chaîne jurassienne. Il prouve la présence d'au moins un village à proximité.

Le Néolithique final: la fin de la pierre polie

Pointe de flèche triangulaire à base concave et ailerons équarris. Les bords portent une retouche fine denticulée bifaciale que l'on retrouve en Bavière et en Europe centrale (silex de Develier). Pointe de flèche triangulaire à base concave et ailerons équarris. Les bords portent une retouche fine denticulée bifaciale que l'on retrouve en Bavière et en Europe centrale (silex de Develier).

A Alle-Noir Bois se situait un village de la fin du Néolithique daté de 2300 av. J.-C., soit du Campaniforme. Mal conservé, on ne connaît rien de son ampleur, ni de son architecture. L'élevage (bœuf, porc, chèvre/mouton) et l'agriculture sont pratiqués. Les échanges sont manifestes avec des populations alsaciennes et du sud de l'Allemagne. Des influences plus orientales, mais aussi avec la vallée du Rhône, sont sensibles. L'exploitation majeure des ressources locales (silex, argiles) prouve une connaissance approfondie de la région et une implantation de longue date. D'autres sites contemporains ont été reconnus en Ajoie.

A Chevenez-En Vaillard, une occupation campaniforme est datée de 2470-2140 av. J.-C à partir des charbons d'un foyer. Les vestiges, peu nombreux, comprennent en outre une fosse, de la céramique et des silex.

A Chevenez-Combe Varu, un corpus céramique et des silex débités sont attribués au Campaniforme, sans qu'un horizon archéologique de cette période n'ait pu être mis en évidence sur ce site occupé en outre au Second âge du Fer.