L'Age du Bronze et l'Age du Fer

L’Age du Bronze moyen: les débuts de la métallurgie

Poteries du Bronze moyen de Saint-Brais. Poteries du Bronze moyen de Saint-Brais.

L'arrivée du bronze coïncide semble-t-il avec une évolution démographique. Tout au long du 2e millénaire, on constate une présence humaine devenant de plus en plus importante et colonisant peu à peu la vallée de Delémont. A la fin du Bronze moyen et au début du Bronze final, on relève la présence de nombreux petits habitats, fermes isolées, répartis sur les flancs et au pied des coteaux de la vallée de Delémont et dans la plaine de l'Ajoie.

Au seuil du plateau des Franches-Montagnes, les grottes de Saint-Brais ont livré un mobilier céramique assez important de la fin du Bronze moyen et des analyses palynologiques effectuées à Lajoux signalent dès cette époque des défrichements : il n'est pas impossible que des estivages de bétail aient été pratiqués alors. Un gisement contemporain est signalé au sommet du Mont Terri en Ajoie.

Le Bronze final: une société très hiérarchisée

Le Roc de Courroux, dominant l’étroit passage de la vallée de la Birse. Le Roc de Courroux, dominant l’étroit passage de la vallée de la Birse.

L'important site du Bronze final du Roc de Courroux, perché sur les hauteurs surplombant le passage de la cluse du Vorbourg, au nord de Delémont, semble surveiller l'entrée de la Vallée.
La vie sociale se développe et se hiérarchise de plus en plus. Deux nécropoles, l'une à Alle, Les Aiges, et l'autre à Delémont, En La Pran, témoignent du rite de la crémation. Les plus anciens dépôts, à Alle, montrent, au début du Bronze final, des fosses allongées avec dépôts des cendres funéraires en pleine terre, de bijoux (bronze et or) et de récipients en terre cuite. Par la suite, au Bronze final toujours, les os calcinés et les offrandes sont ensevelis ensemble en pleine terre ou de préférence dans une urne. La nécropole de Delémont suggère aussi une aire réservée aux enfants et une autre aux adultes. Les ossements brûlés des premiers sont récoltés avec les charbons de bois et les cendres du foyer de crémation, alors qu'ils sont soigneusement triés pour les seconds : les charbons et les cendres ont été volontairement écartés. Les perles en pâte de verre de Delémont montrent des relations avec les milieux méditerranéens, et les fils d'or d'Alle, des parallèles avec la région de la Meuse et de la Marne.

Le premier Age du Fer (Hallstatt): une population connue par ses cimetières

Bonfol, Moncevi. Traces d’un tumulus révélées par des inégalités de croissance du blé (diamètre env. 20 m). Bonfol, Moncevi. Traces d’un tumulus révélées par des inégalités de croissance du blé (diamètre env. 20 m).

Vers 850 av. J.-C., une maîtrise toujours plus poussée de la technologie du feu permettant d’atteindre des températures de 1200 °C, rend possible la fonte du minerai de fer, et la réalisation d’armes et d’outils plus solides. Mais comme sur le Plateau suisse, le début de cette période correspond avec une raréfaction des données archéologiques.
Les rares habitats du Premier âge du Fer découverts à l'heure actuelle sur le territoire jurassien ont tous été localisés au sud de Delémont. A Delémont, En La Pran, les fouilles ont révélé deux unités domestiques distantes de 300 mètres. Dans l'une d'entre elles, le tissage sur métier vertical est attesté. A Delémont, Prés de La Communance, il faut mentionner la découverte d'au moins deux bâtiments appartenant à un établissement rural. Des restes d'habitats moins bien préservés sont également répertoriés à Courtételle, Les Prés Roses et Courrendlin, En Solé, où le travail du fer est avéré.

Quelques objets ou sites connus de la première partie de l'Age du Fer sont en relation avec des rites funéraires. A Bonfol, un tumulus arasé, d'une vingtaine de mètres de diamètre, cerné probablement d'une ceinture empierrée de 2 m de large environ, a été repéré par avion, mais n'a pas été exploré. Au sommet du Mont Terri, un fragment de bracelet en lignite, une fibule et une partie d'un disque en bronze suggèrent une présence humaine (des tombes ?). Des récipients isolés, à Courfaivre et à Delémont, font de même.

Le second Age du Fer (La Tène): il y a 400 ans, un village chez les Celtes

Perles en pâte de verre d’Alle, Noir Bois (diamètre env. 1 cm). Période de la Tène. Perles en pâte de verre d’Alle, Noir Bois (diamètre env. 1 cm). Période de la Tène.

La seconde phase de l'Age du Fer (période dite de La Tène) est mieux attestée. A La Tène ancienne, vers 400 av. J.-C., un village fut construit à Alle, Noir Bois, au pied de la colline du Noir Bois. Il regroupait plusieurs fermes composées d'un modeste bâtiment d'habitation et de greniers. Il s'agit là d'une des rares manifestations d'habitat regroupé en hameau agricole de cette époque mises au jour en Suisse. L'occupation du terriroire se manifeste généralement par de petites exploitations rurales dispersées en zones basses, entre 300 et 500m d'altitude, souvent au pied d'un versant ou dans une combe. Elles sont composées de quelques bâtiments de dimensions modestes sur poteaux, parfois entourées de fossés. Outre l'agriculture et l'élevage, la forge ponctuelle d'objets en fer et le travail des textiles sont les activités les plus souvent rencontrées.
D'autres traces de ces temps reculés ont été mises au jour dans les environs de Delémont. A Courtételle, Tivila, Delémont, En la Pran, ou encore Delémont, Prés de la Communance, les vestiges d'établissements ruraux occupés à La Tène ancienne et moyenne ont été repérés sous l'actuel tracé de l'autoroute. Avec d'autres sites de la même période fouillés en Ajoie à Chevenez, Combe Ronde et Combe En Vaillard, à Boncourt, Grands'Combes ainsi qu'à Alle, Pré au Prince, on commence à entrevoir le peuplement pour une période qui, il y a moins de quinze ans, était quasiment inconnue sur le sol cantonal.

La Tène finale: une fortification du temps de César

Monnaies celtiques à la légende Q DOCI SAM F, attribuées aux Séquanes, frappées vers 57-50 av. J.-C. et provenant du Mont Terri (Cornol). Monnaies celtiques à la légende Q DOCI SAM F, attribuées aux Séquanes, frappées vers 57-50 av. J.-C. et provenant du Mont Terri (Cornol).

A La fin de La Tène moyenne et à La Tène finale, au 2e et au 1er s. av. J.-C., de nombreux habitats ruraux sont avérés tant en Ajoie que dans la vallée de Delémont. Ces installations agricoles, à l'instar de la période précédente, comprennent une ou deux habitations en bois et des greniers. Le travail du fer est en outre attesté dans quelques unes d'entre elles (Delémont, La Deute et Courtételle, La Rintche). Leur découverte se concentrent à proximité des localités de Chevenez (à Combe Ronde, Combe en Vaillard et Combe Varu), d'Alle, (Les Aiges, Pré au Prince, Sur Noir Bois et Pré Monsieur), à Boncourt, Grands Combes, ainsi qu'au sud de Delémont (Courrendlin, En Solé, Delémont, La Deute et En La Pran, Courtételle, La Rintche).
Le site le plus illustre de cette époque est sans doute l'oppidum du Mont Terri à Cornol. Selon les écrits des auteurs romains, en particulier Jules César dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules, la tribu gauloise des Séquanes occupe alors la région du Jura. C'est au cours des troubles liés à la fois à l'exode des Rauraques et des Helvètes et à l'invasion des Germains conduits par Arioviste, appelés en renfort par les Séquanes en guerre contre les Éduens en 58 av. J.-C., qu'aurait été fortifié le sommet du Mont Terri avec la construction d'un murus gallicus.
En regard des nombreux vestiges d'habitat, les sépultures de la fin du Second âge du Fer découvertes sur le territoire cantonal sont rares. On en dénombre en effet que deux, une inhumation à Boncourt, Grands'Combes et une tombe à incinération à Porrentruy, La Perche.